lundi 11 juillet 2005

Ce que nous commençons doit finir 8

Alvin glissa ses mains douces dans le corps de la jeune femme étranglée de douleur. L'enfant se tordait tant qu'il pouvait dans son terrain vague de placenta et lambeaux de chair. Il ressortit sa main aussi vide que ces paquets de mouchoirs lorsqu'ils ont tous été utilisés.
"Il ne sortira pas, c'est sûr, pourquoi avait vous peint cette chambre en rose aussi! Ne comprenez vous pas sa douleur, il n'est pas arrivé qu'il est déjà rejeté. Aigri de ne pas être moins couillu. Si j'étais policier, je vous abattrai sans sommation, mais je suis amant de boulangère et je ne puis plus rien pour votre maison."
C'est sur ces mots, qu'Alvin prit le grand torchon qui ornait la poignée métallique de la fenêtre donnant sur la petite avancée en béton ornée de milles fleurs de saison, pour s'essuyer les mains. Il glissa ses lèvres sur celle de Marie qui n'en revenait pas. Il lui sourit et lui dit qu'il avait une stratégie. L'enfant curieux de ne voir personne bouger pour sauver la femme qui n'arrêtait pas de crier, ressortit sa tête en prenant soin de s'agripper à un quelconque morceau de l'estomac. Plus personne dans la cuisine, plus un chat. Que cette bonne femme qui hurlait à ne plus savoir pourquoi. L'enfant hébété sortit un peu plus et c'est alors que comme un tigre, le bel Alvin se jeta dessus. Il s'était dissimulé sous la table attendant l'instant. L'enfant se débatait et arrachait au passage quelques morceaux de son hôte. La cuisine était repeinte d’un rouge chatoyant qui donne un petit air de printemps fort attrayant à l'oeil. Alvin tirait de toutes ses forces, l'enfant résistait encore en s'entortillant la jambe dans le corps décomposé. Mais Alvin tira trop fort, la jambe lâcha alors qu'il tombait sur ses fesses, le bébé dans les bras. Se relevant, il dit à l'assemblée désabusée mais ragaillardie d'en avoir fini avec l'heureux évènement:
"C'est comme le disent les infirmières, un bien bel accouchement dans la douleur. Félicitation madame, c'est un garçon. Mais vous le saviez déjà. Je suis pris par l'émotion."
Marie attrapa l'enfant et l'entoura du torchon, le gifla plus par plaisir que pour qu'il prenne sa énième respiration. L'homme de la maison, toujours en pyjama, ne savait plus quoi faire. Il ramassa la jambe qui traînait au sol en remerciant le ciel que ce ne soit que ça. La femme criait encore un peu, sans doute sous le coup de l'émotion.
"Rien de grave dans la vie, allez buvons"

L'enfant fut laissé dans l'évier, de sa blessure le sang coulait, l'hémorragie fut vite arrêtée par l'élastique que Marie s'appliqua à placer. Le petit dit alors ces mots qui resteront à jamais dans l'histoire: "Allez papa, reste pas comme un glan, bouge! Avec ma guibole qui pisse le sang, tu as le temps de repeindre la chambre en rouge!". Le nouveau père, ému, s'exécuta. Tout était bien dans le meilleur des mondes, mais l'heure tourne et Alvin ne voulant pas rater son train prit Marie par le bras, fit un rapide au revoir et commença à courir jusqu'à la gare sans plus se retourner.

Ils couraient dans les rues de Bordeaux à en perdre haleine, mais en vain! Leur folie les emmena jusque sur le quai C de la gare Saint Jean où aucun train n'était à quai.

"Alvin pourquoi tient tu tant à te laisser mourir, depuis ce matin je te suis, depuis des mois je t'admire. Nous pouvons vivre ensemble maintenant et surtout profiter de l'avenir. Je t'aime Alvin comme ces raisins que l'on savoure à chaque grain. Tu as ce petit rien qui te rend étranger et qui me rend folle. De tout mon être, de tout ce que je suis, je ne me sens chez moi, que lorsque tes mains recouvrent mes doigts. je te veux comme amant, je te veux comme ami, je te veux tout entier et maintenant, ici. Ce train nous l'avons raté, c'est un signe. Il n'y aura pas de plus belles journées pour te dire que nous devons continuer. Pense à ce que tu as vécu ces dernières années, faisant ce que tu voulais de tes heures, de tes journées. Etais tu vraiment libre de vivre cette liberté? Tu t'es créé l'obligation de vivre libre. Cette obligation est l'opposé de ce que tu voulais. Je ne te propose rien, que ce que je suis, je serais ton aimante, je serais ton amie. Donne moi la main Alvin et partons. Je ne dirais plus ces mots à personne : Je te désire TOI, alors reste."

Alvin lâcha sa main dans un sourire et reprit sa course sans la regarder en direction du bout du quai. Il ne courait plus, il volait, libre comme le vent qui, sur les murs vient trop souvent s'écraser.

à suivre : PART9 : Une dernière Valse pour finir ce qui a été commencé.